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Karim Ghariani

Une victoire et beaucoup de promesses


Pour la première de Nabil Maaloul, la sélection nationale tunisienne s’est imposée contre l’Egypte pour le compte de la première journée des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations 2019. Les Aigles débutent ainsi leur campagne qualificative de la meilleure des façons en prenant d’ores et déjà la tête d’un groupe où le Niger et le Swaziland, futurs adversaires des tunisiens lors de ces qualifications, se sont eux quittés sur un match nul et vierge.

Il avait claqué la porte de la sélection au lendemain d’une humiliation contre le Cap-Vert à Rades même. Après trois années lors desquelles il est allé se ressourcer sur les plateaux TV qataris et où il a pu entrevoir de très près les progrès réalisés par les Aigles durant la dernière CAN, le voilà de retour à la tête d’un groupe qui restait sur deux défaites en amical, défaites qui ont eu raison de la tête d’un Henryk Kasperczak prié de plier bagages et à qui on a trouvé mille et une excuses permettant de justifier un licenciement que certains qualifieront d’abusif. Nabil Maaloul était donc attendu au tournant pour son retour, son premier rendez-vous, qui était déjà synonyme d’un premier test extrêmement important face à une équipe vice-championne d’Afrique et qui semblait offrir bien plus de garanties que son adversaire du soir. En face, des Aigles qui avaient laissé entrevoir des promesses en Janvier dernier, mais qui, comme à leur habitude, paraissent toujours aussi fragiles et restent surtout sur deux contreperformances inquiétantes contre le Cameroun et le Maroc.

En toute logique, les premières critiques, parfois justifiées, sont donc tombées dès l’annonce de la liste des joueurs convoqués par l’ancien coach de l’Espérance pour cette confrontation. C’était tantôt l’absence de Lahmar qui était fustigée, tantôt celle de Badri, mais aussi et surtout la convocation d’un assez grand nombre de nouveaux éléments et le retour d’un certain nombre d’anciens, souvent peu convaincants avec leurs clubs respectifs. Ces critiques se sont ensuite transformées en grosses interrogations dès l’annonce du onze de départ qui allait affronter les pharaons dans la nuit de Dimanche. Entre un axe central Ben Youssef-Meriah inédit, la titularisation d’un Bedoui moyen avec son club à un poste où il est rarement convaincant, et enfin l’absence d’un Sliti qui s’était imposé au Gabon comme l’un des meilleurs joueurs de l’équipe, tous les éléments étaient réunis pour que l’incertitude et l’appréhension inondent les nombreux cafés et autres terrasses tunisiennes diffusant ce choc Nord-Africain.

Des Aigles entreprenants mais peu efficaces

Tandis que la titularisation de Ben Youssef sur le côté droit de l’attaque tunisienne et le choix d’aligner un milieu à trois renforcé pouvaient laisser supposer que les hommes de Maaloul allaient surtout évoluer en contre-attaques en privilégiant un jeu plus direct, ces derniers n’ont pas perdu de temps en contredisant toutes ces prévisions et en prenant tout de suite le jeu à leur compte. On a donc pu assister à une équipe très entreprenante, attaquant les premiers instants du match de la meilleure des façons en mettant la main sur le ballon et en le récupérant très rapidement à la moindre perte. Extrêmement agressifs face à des Pharaons qui ont perdu une grande majorité de leurs duels, les tunisiens sont ensuite parvenus à se créer quelques occasions lors de ces 45 premières minutes. Alors que Msakni, capitaine du soir, parvient à apporter du danger dans la défense égyptienne à la moindre accélération, la plus grosse opportunité de cette première période du côté des Aigles intervient sur un corner à la suite duquel la tête de Syam Ben Youssef vient s’écraser sur le poteau droit du portier égyptien. Les tunisiens ont la maîtrise du ballon, défendent de façon exemplaire en exerçant un contre-pressing à la moindre perte, mais ils ne parviennent pas à mettre le rythme nécessaire, un rythme qui parviendrait à créer le déséquilibre au sein d’une défense égyptienne bien en place, parfois faute d’un manque de justesse technique notamment incarné par le côté droit de Fakhreddine Ben Youssef. Si l’activité énorme de Ali Maaloul sur son côté gauche constitue elle aussi une menace énorme pour le malheureux Ahmed Fathi et sa défense, les décalages créés par les montées du latéral d’Al Ahly ne permettent pas non plus d’aboutir à l’ouverture du score des tunisiens. Le score demeure donc vierge au bout d’une première mi-temps à la suite de laquelle les Aigles peuvent nourrir pas mal de regrets.

Une deuxième mi-temps parfaitement maîtrisée

Les joueurs de Maaloul attaquent ensuite la seconde période avec les mêmes intentions, et sont d’ailleurs récompensés dès le retour des vestiaires. On joue alors la 48e minute, et c’est le moment que choisit Msakni pour dégainer et servir d’une passe magistrale Taha Yassine Khenissi qui ne se fait pas prier pour crucifier, du gauche, un Sherif Ekramy à la main pas assez ferme. Les Aigles ont désormais fait le plus dur et mènent au score face au vice-champion d’Afrique, dans un match qui s’apparente déjà à la finale du groupe. On pouvait alors s’imaginer que les hommes de Maaloul allaient reculer, laissant le ballon à des égyptiens enfin décidés à commencer à jouer. Il n’en sera rien, et, dans le prolongement de ce qu’ils avaient pu laisser entrevoir lors de la dernière CAN, les Aigles continuent de faire le jeu et se montrent toujours aussi conquérants dans les duels et à la perte du ballon. Le trio Sassi-Ben Amor-Chaalali se montre lui extrêmement efficace à la récupération et permet, à plusieurs reprises, de voler le cuir dans les pieds des égyptiens, et ce dans les 5 secondes qui suivent la perte de balle tunisienne. Si Msakni continue d’assurer le spectacle et de rappeler une nouvelle fois à quel point il n’a rien à faire au Qatar, les tunisiens rentrent progressivement dans une phase de gestion du score et sont tout près de se faire surprendre sur un lobe de Abdallah Said. Ces derniers sont ensuite tout près d’aggraver la marque à la suite d’une action collective d’école qui aboutit sur une remise pour un Khenissi trop court qui ne parvient pas à reprendre le ballon et tente d’obtenir le penalty en s’écroulant dans la surface. Il n’en sera rien, et le tableau d’affichage restera figé sur ce score de 1 but à 0 en faveur d’une Tunisie qui assure le nécessaire en s’installant sur le fauteuil de leader et en envoyant un message clair à son principal concurrent du groupe.

Satisfaisant ... pour une première

La prestation globale de l’équipe alignée pour ce match a donc été convaincante et peut laisser entrevoir de belles promesses pour les échéances à venir, en particulier les deux matchs capitaux face à la RD Congo en Septembre prochain qui seront décisifs quant à une éventuelle qualification au Mondial russe. Si des réserves avaient légitimement pu être émises avant la rencontre par rapport à la défense, cette dernière s’est montrée extrêmement solide tout au long des 90 minutes avec un axe central à la complémentarité parfaite composé d’un Ben Youssef très solide et concentré jusqu’au bout, assisté par un Meriah excellent à la relance et lui aussi très appliqué. Si le jeu tunisien penchait en grande partie à gauche, c’était surtout en raison de l’activité d’un Ali Maaloul infatigable et présent aussi bien offensivement que défensivement. Omniprésent sur toutes les attaques tunisiennes, il a également pu réaliser des retours salvateurs dans les pieds d’un Mohamed Salah invisible. Bedoui, quant à lui, à l’apport offensif bien moindre que celui de son coéquipier du côté opposé, a également réalisé un match très correct en se montrant propre sur ses relances et disponible à chaque fois que son ailier se retrouvait en difficulté. Le poste de latéral n’étant pas son poste de prédilection, le remplaçant de Nagguez a tout de même assuré l’essentiel et n’avait pas beaucoup de boulot face à un Ramadhane Sobhi lui aussi très discret. Le milieu de terrain, maintenant, est assurément le compartiment qui peut laisser entrevoir les plus belles promesses. En effet, pour la première fois depuis bien longtemps, l’équipe tunisienne semblait, sur cette rencontre, avoir enfin trouvé l’équilibre qui lui manquait tant, avec trois éléments complémentaires et extrêmement efficaces à la récupération. Tandis que Ben Amor et Chaalali, dotés d’un volume de jeu plus important que celui de Sassi, étaient au four et au moulin, l’ancien milieu de Metz était quant à lui la plaque tournante de l’entrejeu dans une position qui ressemble davantage à celle d’un Regista et dans laquelle il pouvait laisser entrevoir toute sa qualité technique. Maitrise du ballon, capacité à le récupérer rapidement, et une marge de progression encore importante pour trois éléments qui disputaient là leur première rencontre ensemble dans ce 4-3-3. Il ne reste désormais plus qu’à voir ce que cela pourrait donner face à un adversaire qui parviendra à imposer un défi physique et qui se montrera plus agressif que cette équipe égyptienne. Cet adversaire, justement, sera sans doute notre concurrent pour une place qualificative à la Coupe du Monde, la RD Congo.

Enfin, le trio offensif était quant à lui composé, de gauche à droite, de Youssef Msakni, et des deux attaquants de l’Espérance Taha Yassine Khenissi et F. Ben Youssef. Tandis que le match du joueur de Lekhwiya a, comme d’habitude, offert son lot d’interrogations au monde du football et rappelé l’immense gâchis que représentait sa carrière, son coéquipier du côté droit à lui, rappelé aux tunisiens à quel point ses limites techniques ne pouvaient lui permettre d’aspirer à une place de titulaire sur le long terme au sein de cette équipe. Titulaire, il l’était pourtant lors de cette rencontre où Nabil Maaloul a, semble-t-il, préféré sécuriser le côté droit au détriment de la qualité technique. Il serait donc logique de revoir lors des prochains rendez-vous un Naim Sliti qui a montré plus de choses en 3 minutes de jeu que Ben Youssef en 90 minutes. Enfin, et comme à son habitude, Khenissi a fait énormément de bien par ses déplacements incessants et ses appels dans la profondeur, dont l’un a d’ailleurs abouti sur le seul but de la rencontre. Véritable guerrier, l’attaquant de l'Espérance confirme son niveau de semaines en semaines et devrait bientôt attirer les sirènes de l’Europe.

Malgré les vives critiques qui ont suivi sa nomination et qui ont persisté jusqu’au coup de sifflet final de M. Lahrach, Nabil Maaloul peut donc être satisfait de son baptême du feu avec cette sélection nationale et semble avoir trouver la bonne formule pour les échéances à venir. Cependant, il est primordial de construire sur cette victoire, qui, même si prometteuse, s’est achevée sur le plus petit des scores. Il est aujourd’hui nécessaire de se remettre en question et de ne pas se reposer sur des acquis encore extrêmement fragiles. Comme dit précédemment, la marge de progression est encore importante, et les rencontres à Tunis et en RDC du mois de Septembre prochain seront déjà primordiales pour une génération qui bénéficie de toutes les qualités nécessaires pour aller jusqu’en Russie.

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