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Karim Ghariani

CAN 2017 : Tunisie : A quoi faut-il s’attendre ?



Avec une sélection nationale n’ayant plus atteint le dernier carré de la CAN depuis 2004 et sa victoire à domicile, la Tunisie se retrouve années après années reléguée à un simple statut d’outsider, avec parfois même des difficultés à passer la phase de groupes de la compétition. Si, un temps, l’équipe semblait souffrir d’un manque de talent, cela n’est plus le cas aujourd’hui et à la veille d’une compétition sur laquelle le peuple tunisien peut placer beaucoup d’espoirs … en attendant d’être à nouveau grandement déçu ?


Si la sélection tunisienne a attendu la dernière journée des éliminatoires afin de décrocher son billet pour cette CAN 2017 en battant une bien modeste équipe du Liberia, cela est en grande partie dû au fait que les Aigles de Carthage et leur staff ont entamé une importante reconstruction après l’échec (et le scandale) de la précédente édition Equato-guinéenne, du moins sur le papier. Le belge George Leekens a ainsi quitté ses fonctions laissant sa place au Polonais Henryk Kasperczak, déjà bien connu des tunisiens. En effet, celui-ci a été le sélectionneur des Aigles de 1994 à 1998, atteignant même la finale de la CAN 1996. Ce dernier a donc entamé un renouvellement progressif du groupe, faisant appel à un grand nombre de joueurs évoluant dans le championnat local, parmi lesquels on retrouve aujourd’hui des titulaires de la sélection à l’image de Hamza Lahmar, Hamdi Nagguez ou encore Taha Yassine Khenissi. Près de la moitié des joueurs présents en Guinée Equatoriale manqueront ainsi à l’appel au Gabon au mois de Janvier, laissant la place à des éléments pour la plupart plus jeunes, mais pas forcément moins intéressants. En effet, si des éléments expérimentés comme Saihi, Ragued ou encore Chikhaoui ont perdu leur place au sein du groupe, la qualité des joueurs chargés d’assurer la relève est indéniable. Outre les trois cités précédemment, ont également été incorporé des éléments comme Ben Amor, lui aussi évoluant dans le championnat local et possédant des aptitudes aussi bien physiques que techniques extrêmement intéressantes, ou encore Naim Sliti, devenu récemment titulaire à Lille et qui peut s’imposer comme le véritable maître à jouer de cette équipe tunisienne au Gabon. En ajoutant à cela des joueurs certes en manque de rythme mais aux capacités certaines comme Khazri ou Msakni, la Tunisie parait bénéficier d’un groupe à la qualité incontestable, au moins sur le plan offensif. Car défensivement, c’est une tout autre histoire.

Commençons d'abord par le positif : la sélection semble aujourd’hui avoir enfin trouvé ses deux latéraux titulaires, avec Ali Maaloul à gauche et Hamdi Nagguez à droite. Tous deux très offensifs dans un système en 3-5-2 qui leur sied à merveille, ils multiplient les montées et arrivent parfaitement à faire étirer le bloc adverse et à poser des difficultés, même s’il reste néanmoins quelques retouches à faire au niveau du replacement et du travail avec les milieux récupérateurs, notamment en ce qui concerne la couverture lors des contre-attaques adverses. Cependant, c’est un peu plus bas que l’on retrouve les réels soucis de la sélection. En effet, le trio des centraux, qui est normalement composé d’Abdennour, Ben Youssef, et Yaakoubi ou Dhaouadi, se retrouve assez souvent en difficulté et pris de vitesse, notamment face à des équipes bénéficiant d’éléments offensifs percutants. Si ses capacités physiques sont indiscutables, cette défense manque cependant de vitesse et a notamment été mise à mal par des attaquants virevoltants comme Lass Bangoura et Ibrahima Traoré (Guinée), ou plus récemment par Iker Muniain et la sélection basque. Nous pouvons alors imaginer que les difficultés ne seront que plus grandes face à des adversaires comme le Sénégal ou l’Algérie, qui bénéficient d’éléments offensifs extrêmement rapides et très à l’aise techniquement à l’instar de Riyad Mahrez ou Sadio Mané. Ce problème s’ajoute aux difficultés qu’éprouvent souvent ces défenseurs lors de la construction des actions. En effet, si Abdennour s’est beaucoup amélioré dans ce domaine et que Dhaouadi a fait bonne impression contre la Catalogne, Ben Youssef (et Yaakoubi dans une moindre mesure) a plus de difficultés à participer aux attaques et n’est pas vraiment au point sur le jeu long, ce qui oblige souvent les milieux de terrain, et notamment Lahmar et Sassi à redescendre très bas afin d’assurer la construction des actions. Ces problématiques liées à la lenteur des défenseurs et aux difficultés dans la construction semblent difficiles à résoudre à la veille de la compétition, ceux-ci nécessitant l’incorporation sur un moyen terme d’éléments plus rapides et plus à l’aise balle au pied. Dans cette optique, nous pouvons pour le futur songer à des joueurs comme Slimane Kchok, justement surprise de la liste des 23, ou Yassine Meriah qui était lui déjà présent contre le Pays Basque mais qui ne figure pourtant pas dans cette dernière. Il est à noter que dans un grand nombre de défense à trois, les entraîneurs ou sélectionneurs font souvent le choix d’intégrer un joueur qui est un latéral de formation, pour justement répondre à ce problème et pour être plus performant lorsqu’il s’agit de se projeter vers l’avant. Nous pouvons notamment citer les exemples d’Azpilicueta à Chelsea, Kolarov à Manchester City ou enfin Ben Davies en sélection Galloise. A nous de nous en inspirer ! Enfin, l’autre danger majeur se situe dans les nombreuses erreurs de placement que l’on a pu remarquer lors des dernières rencontres de la sélection, ce qui aurait notamment pu coûter le match face à la Libye. Il y a encore quelques jours, le sélectionneur évoquait ces difficultés et le problème des buts encaissés en parlant « d’erreurs d’inattention et de placement », après que l’équipe ait concédé 6 buts en seulement deux rencontres. Ces mêmes difficultés ont d’ailleurs également pu être remarquées lors des deux derniers matchs de préparation face à l’Ouganda et à l’Egypte.

Ces matchs de préparation nous ont d’ailleurs permis de tirer quelques enseignements, notamment sur les capacités de l’équipe et de certains éléments en particulier. Que ce soit dans le 3-5-2 habituel ou dans le 4-3-3 expérimenté contre l’Ouganda et l’Egypte, toutes les difficultés attendues sur le plan défensif ont été confirmés, avec un (trop) grand nombre d’occasions concédées. L’action illustrant au mieux ces difficultés est sans doute le deuxième but de la sélection catalane, avec une défense tunisienne totalement prise de vitesse par le latéral droit Gerard Valentin, qui n’avait plus qu’à adresser un centre pour son coéquipier Sergio Garcia qui se retrouve seul dans la surface (erreur de placement), arrivant à conclure sans difficulté. Le troisième but concédé face à la sélection basque est également le symbole de ces problèmes évoqués, avec un joueur se retrouvant absolument seul au second poteau et qui peut prendre tout son temps afin de placer une tête victorieuse. La grande question est désormais de savoir si Kasperczak intégrera Dhaouadi dans son onze titulaire lors de cette CAN afin d’éviter ses problématiques liées à la relance, et si Ben Youssef, aussi en grande difficulté dans son club, fera toujours partie de ce dispositif.

Au niveau des latéraux, si Haddadi a plutôt fait son match face à la Catalogne, lui et Abderrazak ont été écartés de la liste finale au profit du jeune Slimane Kchok, latéral polyvalent pouvant également évoluer dans l’axe de la défense. A droite, Mathlouthi a encore une fois démontré qu’il était encore trop insuffisant défensivement et trop tendre offensivement pour pouvoir prétendre à une place de titulaire, et c’est Nagguez qui devrait assurer sa place à la CAN selon toute logique.

Plus haut, il existe un doute dans la mesure où Mohamed Amine Ben Amor, titulaire lors des dernières rencontres, est aujourd’hui touché et est incertain pour le début de la compétition. De ce fait, il est possible que Ferjani Sassi débute le premier match contre le Sénégal à sa place aux cotés de Hamza Lahmar, comme on a pu le voir face à l’Egypte. Lahmar justement a lui confirmé ses dernières prestations lors de ces matchs de préparation, se montrant indispensable dans les attaques placées et la conservation du ballon, mais a également rappelé son importance sur coup de pied arrêté en inscrivant un coup franc direct contre l’Ouganda. Première rampe de lancement, il est le véritable dépositaire du jeu de l’équipe, réalisant toujours le geste juste en alternant jeu cours et jeu long. Son profil de Regista est également inédit en Tunisie puisqu’il s’agit d’un joueur doté de capacités techniques exceptionnelles mais placé très bas sur le terrain à la construction des actions. Comme on peut le voir dans certains clubs européens, et surtout Italiens, il s’agit donc d’un joueur doté de qualités propres à un numéro 10, position où il a d’ailleurs débuté sa carrière, mais évoluant en position de numéro 6 où il a été replacé par Faouzi Benzarti. De plus, sa connexion avec Sliti et Msakni que l’on a surtout pu apercevoir contre la Catalogne s’avère très intéressante. Ces derniers ont eux aussi réalisé une préparation convaincante, avec notamment un magnifique triplé face à la Catalogne pour le dernier cité, faisant ainsi taire les critiques à son encontre. On en revient même à se questionner sur le rôle que pourrait avoir un Wahbi Khazri dans ce onze tunisien, surtout que celui-ci a été très irrégulier dans ses derniers matchs avec la sélection, sans compter le fait qu’il ne bénéficie que d’un faible temps de jeu avec son club de Sunderland. De plus, le joueur des Black Cats a été contraint de laisser sa place dès la première mi-temps de la rencontre face à l’Egypte en raison d’une blessure à la cheville qui pourrait le diminuer lors du premier match face au Sénégal Dimanche. La question qui se pose néanmoins serait de savoir si le joueur évoluant en Premier League ne serait pas indispensable à un dispositif Tunisien qui manquerait cruellement de créativité au milieu de terrain, que ce soit dans un système en 3-5-2 ou en 4-3-3 comme entrevu face à l’Egypte, où les trois joueurs du milieu ne parvenaient pas à faire accélérer le jeu d’une Tunisie trop stérile. Cette Tunisie qu’on a pu observer au Caire manquait en effet d’un milieu capable de prendre le jeu à son compte, même si un élément comme Naim Sliti avait tenté de prendre les choses en main en début de rencontre. On risque d'ailleurs de revoir une sélection tunisienne à la possession de balle stérile si Kasperczak décide d'incorporer un milieu récupérateur de plus aux cotés de Lahmar et Sassi afin de pallier à la blessure de Khazri, comme cela a été vu face à l'Egypte avec un Larry Azzouni qui avait pris la place du joueur de Sunderland. Enfin, l’avant-centre des aigles lors de cette CAN devrait selon toute vraisemblance être Taha Yassine Khenissi. Le joueur évoluant à l’Espérance a en effet énormément progressé ces derniers mois, parvenant à peser véritablement sur les défenses adverses tout en étant doté d’une vitesse et d’une qualité technique faisant de lui un attaquant complet et capable de proposer une véritable variété dans son jeu. On a par exemple pu voir que ses appels ont apporté beaucoup de profondeur face à la Catalogne, notamment sur le premier but de la sélection.

Lors de cette compétition, il faudra donc s’attendre à voir notre chère sélection longtemps subir face au Sénégal et à l’Algérie, en tentant de profiter des contre-attaques et des espaces laissés par les défenses de ces deux équipes grâce à la qualité technique et à la vitesse des Msakni, Sliti, et autres Khenissi. Lahmar sera également très important dans l’exploitation de ces espaces à travers sa qualité de passe d’exception. Le plus important sera donc de limiter les erreurs de placement entrevues auparavant, tout en évitant de laisser les joueurs Algériens et Sénégalais combiner entre eux en étant trop attentiste, ce qui risquerait de leur donner l’opportunité de prendre de vitesse la défense des Aigles. Ainsi, l’agressivité devra être de mise, surtout contre une équipe aux qualités physiques importantes comme le Sénégal qui bénéficie d’éléments comme Kouyaté, Ndoye ou encore Diouf. Le point positif se situe néanmoins dans le fait que ces deux rencontres face aux favoris de la compétition feront office de véritable test pour une sélection tunisienne qui n’a plus affronté de grandes nations en match officiel depuis bien longtemps, ce qui lui permettra de tirer des enseignements importants pour la préparation de la Coupe du Monde 2018. De plus, en cas de qualification pour les quarts de finale, cela donnera des ailes à cette équipe qui pourra ambitionner d’aller loin dans la compétition, et pourquoi pas atteindre ce dernier carré qui manque tant au peuple tunisien.

Compositions probables pour affronter le Sénégal lors du premier match, en 4-2-3-1 ou en 3-5-2 :


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